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Page:Deschamps - Marivaux, 1897.djvu/167

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MARIANNE.

cela se fond ensemble : ce qui fait un amour tendre, et non pas vicieux, quoique à la vérité capable de vice ; car tous les jours, en fait d’amour, on fait très délicatement des choses fort grossières…. »

Étonnante de clairvoyance cette petite ! Et, en même temps, admirable de vertu Elle échappe aux tendresses de ce vieillard, et sa bonne étoile veut qu’au sortir de l’église, elle soit remarquée par un jeune homme très beau et fort bien tourné. Le hasard, qui, en de pareilles rencontres, ne fait jamais rien à demi, jette cette jolie victime sous les chevaux d’un maladroit cocher, juste à point pour que ce jeune homme se précipite à son secours. Ce sauveur imprévu la regarde. Elle est gracieuse, avec sa mantille, sa cornette et ses mitaines de basin ! Et lui n’est pas mal avec son jabot de mousseline et son tricorne bordé d’argent. Bref, la petite lingère est consolée des assiduités de M. de Climal par les attentions de M. de Valville. Ici, l’action se complique. Valville est précisément le neveu de Climal ! Rivalité du neveu et de l’oncle. Celui-ci adresse à l’orpheline des remontrances paternelles sur l’inconséquence des jeunes gens, sur leurs galanteries frivoles, sur leur infidélité coutumière, enfin il débite tout ce que débitent en pareil cas les roquentins ridicules. Elle lui réplique avec la fougue d’un jeune petit cœur fier, vertueux, et insulté. Mais quelle malchance ! Valville survient au milieu de ce tête-à-tête. Il en prend de l’ombrage, et sort en claquant les portes, croyant sincèrement que Marianne est la maîtresse de l’oncle libertin.