sonnelle. De la façon dont cela se passait dans son esprit, je voyais que c’était lui qui se réconciliait avec les puissances, ou plutôt il était tour à tour l’Allemagne, l’Angleterre, la Hollande et la France. Il avait fait la guerre, il faisait la paix. L’admiration judicieuse qu’il avait pour les ministres lui en glissait une de la même valeur pour lui-même. Bientôt les ministres et lui ne faisaient plus qu’un, sans qu’il s’en doutât. Je sentais que dans son intérieur il parcourait superbement un vaste champ de vues politiques ; il exagérait sa matière avec volupté ; c’était l’homme chargé des affaires de tous ces royaumes ; car il était Allemand, Hollandais, Anglais, Français, il était tout pour avoir le mérite de tout faire. Quelquefois la difficulté des négociations nécessaires l’étonnait extrêmement ; mais je le voyais venir ; il n’y perdait rien à s’étonner, il en avait plus d’honneur à percer dans les voies qu’on avait tenues pour faire réussir ces négociations…. »
Ce portrait de diplomate en plein air n’est pas mal réussi. On voit combien on dissertait, dans ce temps-là, sur cet équilibre que l’on appelait alors la « balance de l’Europe » et que nous désignons par le nom, plus barbare, de « concert européen ».
Plus loin, notre « contemplateur des choses humaines » s’arrête dans le salon d’une femme du monde, et écoute une conversation. On daube naturellement sur le prochain, mais par de savants détours et avec des précautions infinies, selon les rites habituels du marivaudage.
On parle d’une voisine.
« C’est une fort aimable femme », dit quelqu’un.