Pourquoi Gaudreau s’est-il arrêté ? Pourquoi suit-il du regard cette pièce de bois superbe s’en allant pour toujours ?… Il songe au moulin lointain de son rêve. Que de planches donneraient ces troncs sciés en belles tranches luisantes et parfumées !
Son rêve !… Il s’obstine à le vouloir. Sa hantise le fait bourru :
— Quand finirez-vous, traînards ? Laissez donc ces fonds de tas : vous voyez bien que l’eau montante les disloque et les emporte.
La crue gagnait d’heure en heure. La débâcle sur le lac activait les flots et les billots. De ceux-ci quelques-uns s’accrochaient, de chaque bord de la rivière, aux branches retombantes des aulnes : d’autres s’accumulaient sur les rochers émergeant des remous. La hardiesse, l’endurance habile de nos petits « drivers » les refoulait dans l’irrésistible course vers le lac. Et, rendus là-bas, vogue la galère, plus on ne s’en souciait… Leurs billots, vendus et payés, se confondaient avec ceux innombrables de la Compagnie…
Un soir, rien ne resta plus sur la rive ou dans le courant : tous les tas avaient disparu. Le chantier Gaudreau reposait définitivement.
Que serait demain ?
Petit François avait dormi longtemps.