Ses attraits empruntez ont pour luy trop d’appas.
Elle voudroit luy plaire, et ne luy plaire pas.
Elle veut s’irriter contre son propre charme :
Que de ses plus doux traits sa beauté se desarme,
Perdre l’attrait divin de ce visage faux,
Et que l’œil de Clovis y marque des deffauts :
Afin qu’à d’autres feux son amour s’abandonne ;
Et qu’en laissant Clotilde, il adore Albione.
Mais son vague penser en vain s’est écarté.
Elle n’est plus Clotilde, en perdant sa beauté.
Le puissant charme veut qu’elle soit toute aimable ;
Et ne peut la monstrer semblable et dissemblable.
Ah ! Dit-elle, à quels maux mon cœur est-il reduit ?
Le bonheur qui me cherche, en mesme temps me fuit.
Je reçoy de Clovis les soupirs, les tendresses,
Les regards amoureux, les doux soins, les caresses :
Mais à Clotilde seule il croit les departir :
Et je suis Albione, et ne puis les sentir.
Je suis de mon amant la rivale et l’espouse.
Je suis en mesme temps et contente et jalouse.
Helas ! Mon propre bien me trouble incessamment ;
Et mon plus grand bonheur, est mon plus grand tourment.
Clotilde à ses faveurs, bien qu’elle en soit absente ;
Et je suis malheureuse, encor que joüissante.
Clovis, quelles faveurs ? Et que vous m’offensez,
Si ce n’est pas à moy que vous les addressez.
Page:Desmarets - Clovis ou la France Chrétienne.djvu/210
Apparence
Cette page n’a pas encore été corrigée