Page:Desmarets - Clovis ou la France Chrétienne.djvu/211

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Par moy, de sa Clotilde il sent la joüissance ;
Et je fay qu’absent d’elle il gouste sa presence.
Je ne puis plus tenir mon ardeur en suspens.
Je ne veux plus le rendre heureux à mes despens.
Puisque d’heur et d’espoir ma flame est dépourveuë,
Je ne puis plus souffrir ses plaisirs ny sa veuë.
J’abhorre de luy plaire avec cette beauté.
Je veux briller par moy, non d’un charme emprunté.
Trop heureuse Clotilde, ah ! Que tu serois vaine,
Si tu pouvois sçavoir et ma feinte et ma peine !
Que par moy je ne pûs acquerir ce grand roy ;
Et n’osay dans mon cœur l’esperer que par toy.
Je ne veux desormais rien qui ne m’appartienne.
Dérobant ta beauté, j’ay fait honte à la mienne.
Mais en quittant ses traits, pour reprendre les miens,
Dépoüillons-nous aussi de nos honteux liens.
Clovis pût-il un jour estre sous mon empire,
Pour luy faire sentir les maux dont je soupire.
Mais, ô ! Mon desespoir, je puis te soulager.
Je conçois un projet, fatal pour me vanger
Et de ce fier monarque, et de celle qu’il aime.
Je vay par sa beauté la destruire elle mesme,
Soüiller toute sa gloire, et de tous les esprits
La rendre pour jamais l’horreur et le mespris :
Et par une vangeance infaillible et sans peine,
Pour elle en son amant faire naistre la haine.