Page:Desmarets - Clovis ou la France Chrétienne.djvu/447

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Apres m’avoir volée à ceux de ma maison,
Tu m’as volé l’honneur, corrompant ma raison.
Ne pouvant l’esperer par un nœu legitime,
Tu fis que je l’acquis par la honte et le crime :
Que je conceûs de luy ce fruit doux et cruel,
D’une part innocent, de l’autre criminel ;
Et qu’il ne reste plus à ma fureur extreme,
Qu’à vanger mon forfait sur l’innocence mesme.
Mais c’est le seul remede à mon mal si pressant.
La rage est plus celebre à perdre un innocent.
Ah ! Que ne peut encor ma mourante colere
Le jetter par morceaux dans le sein de son pere ?
Immolant à ses yeux ma vie et son enfant,
Je penserois alors mourir en triomphant.
Mais avant mon trépas, répandons la vangeance,
Et sur toute sa race, et sur toute sa France.
Si le ciel et l’enfer écoutent les mourans,
Ciel, enfer, suspendez vos aspres differends.
Ou si vous ne pouvez quitter vostre querelle,
Ciel, tu n’es pas pour moy : c’est l’enfer que j’appelle.
Tristes dieux, ou demons, pour la derniere fois,
Sortez du sombre Averne aux accens de ma voix.
Accourez, Alecton, Megere, Tisiphone,
Si vous vinstes jamais au secours d’Albione.
Entortillez vos crins des serpens les plus noirs
Dont jamais vostre rage arma les desespoirs.