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Page:Desmarets - Clovis ou la France Chrétienne.djvu/508

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J’ay merité la mort : et je mourray contente,
Si je suis en mourant chrestienne et pénitente.
A ces mots, chacun tremble et d’horreur et d’effroy.
Lisois en mesme temps se jette aux pieds du roy,
Qui seul la contemploit d’un paisible visage.
Juste prince, dit-il, puny moy de sa rage.
Moy seul je l’ay causée, irritant sa douleur.
Non, dit-elle, admirez la force de son cœur.
Car le ciel ne veut pas que ma honte supprime
L’éclat de sa vertu, ny l’horreur de mon crime.
Seule je suis coupable : et luy seul de nous deux
Sceût garder l’innocence en un cœur plein de feux.
Il m’aimoit : et tu vois que toute criminelle
Il me cherit encor d’un cœur pur et fidelle.
Je voulus le tenter, pour l’armer contre toy :
Et je fus le grand prix, pour corrompre sa foy.
Son ame en ce combat, brulante et glorieuse,
Me fit voir de son feu sa foy victorieuse.
Voyant que de mon cœur il dédaignoit le prix,
J’eus dessein, par sa mort, de punir ce mépris.
Je ne sçay quel pouvoir le tira de ma chaisne :
Et j’ay moins merité son amour que sa haine.
Mon transport à moy mesme encore fait horreur.
Je vous eûsse immolez tous deux à ma fureur.
Mais la grace du ciel, qui luit en ce baptesme,
M’ayant changé le cœur, je t’honore, et je l’aime.