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sens de nouveau ce que je disois, il y a un an, combien j’ai eu tort de quitter la plume périodique, et de laisser le temps à l’intrigue de frelater l’opinion des départemens, et de corrompre cette mer immense par une foule de journaux, comme par autant de fleuves qui y portoient sans cesse des eaux empoisonnées. Nous n’avons plus de journal qui dise la vérité, du moins toute la vérité. Je rentre dans l’arène avec toute la franchise et le courage qu’on me connoît.

Nous nous moquions, il y a un an, avec grande raison, de la prétendue liberté des Anglais, qui n’ont pas la liberté indéfinie de la presse ; et cependant quel homme de bonne foi osera comparer aujourd’hui la France à l’Angleterre, pour la liberté de la presse ? Voyez avec quelle hardiesse le Morning Chronicle attaque Pitt et les opérations de la guerre ! Quel est le journaliste, en France, qui osât relever les bévues de nos comités, et des généraux, et des jacobins, et des ministres, et de la commune, comme l’opposition relève celle du ministère britannique ? Et moi Français, moi Camille Desmoulins, je ne serois pas aussi libre qu’un journaliste anglais ! Je m’indigne à cette idée. Qu’on ne dise pas que nous sommes en