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Page:Desnoiresterres - La jeunesse de Voltaire.djvu/92

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GUYOT DE MERVILLE.

M. Alain, près les degrés de la place Maubert[1]. » Les dernières traces de cette grande passion condamnée à une existence éphémère sont à la date du 10 février. Quoi qu’on dise, il est sous le charme, il aime ; il fait, il fera tout ce qui est en lui pour combler la distance qui le sépare de sa maîtresse. Ses recommandations sont d’un homme auquel ses projets sont chers et qui n’y renoncera pas de gaieté de cœur. Ses lettres ne nous sont parvenues que par madame Dunoyer, qui, pour grossir de quelques pages les Lettres historiques et galantes, ne fut pas plus arrêtée par le peu de décence d’une pareille pubUcation que par les choses assez peu flatteuses pour elle qui se rencontrent à chaque instant dans la correspondance du poëte. Elle épiait sa fille, ses moindres démarches ; probablement mit-elle la main sur ces poulets amoureux. À moins qu’on ne veuille admettre qu’elle n’eût retourné cet esprit mobile, facile à mener et qui devait en passer, en fin de compte, par ses volontés sans se sentir à son égard ni grande tendresse ni grande estime. Mais sans chercher si loin, le secret de la brusque interruption de leurs rapports ne nous est que trop révélé. Le faible cœur de Pimpette ne put résister à ce dissolvant de l’absence. Un jeune Français, moins âgé de deux ans qu’Arouet, Guyot de Merville, l’auteur du Consentement forcé, se trouvait à la Haye ; il eut tout aussi aisément accès chez madame Dunoyer, et, ce qui

  1. Il est à croire que ce M. Dutilli habitait la maison que le payeur des épices possédait, rue Maubuée. Ce fut là la raison qui fit élire au poëte domicile dans cette rue et sans doute aussi la raison qui l’engagea plus tard à le transférer ailleurs.