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Observation détaillée sur une lésion grave et très compliquée à la tête accompagnée de symptômes fâcheux… avec des réfléxions


Le nommé Laurent Dorel, maréchal à Remi près de Compiègne, âgé d’environ 50 ans tomba de 12 pieds de haut sur le côté gauche et notament de la tête où il se fit une contusion d’autant plus forte qu’elle porta contr l’aire d’une grange où le sol m’a paru avoir la dureté du pavé. C’étoit le 11 decembre 1784 vers 10 heures du matin. Personne n’a pu sçavoir bien positivement le tems que le blessé avoit resté sur sa chute ; et étant rentré chez lui sans être aidé de personne, à peine se souvenoit-il de ce qui venoit de lui arriver. Il traînoit la cuisse et la jambe du côté droit, et dans l’après midi du même jour, ces deux extrémités devinrent paralitiques. Pendant les premières heures qui suivirent l’accident, il saigna du nez, vomit à plusieurs reprises, tomba insensiblement dans l’assoupissement, délire et enfin perdit connoissance. Ayant été soigné plusieurs fois dans les 24 heures, la connoissance lui revint en partie, les extrémités du côté droit paralisées firent quelque mouvement : mais ce mieux ne fut pas de longue durée, le blessé retomba dans le délire, absolument dans l’état que je viens d’exposer dans lequel je le trouvai le jour de ma 1re visite qui étoit le 14 du et la 4e depuis sa chute. J’appris de plus qu’il avoit eut des mouvemens convulsifs dans les muscles de la face et du bras du côté gauche, ce qui continua depuis de loin en loin. Quoique le blessé fut toujours dans le délire, il sceut me répondre qu’il souffroit de la tête, mais sans qu’il pût désigner un lieu préfix, portant sa main, à chacune de mes questions, sur l’œil et le front du côté droit que je lui ai vu frotter plusieurs fois : il se plaignoit aussi très particulièrement du dos et de l’épaule du côté gauche où je vis des signes de meurtrissures. Malgré cela, il paroissoit préferer qu’on le couchât sur le même côté. En considérant attentivement ce qui s’offroit à la vue, sa face étoit décolorée, ses yeux marquoient peu de vivacité, et le droit encore moins ; sa langue étoit médiocrement humide. Il demandoit à boire souvent et buvoit avec un plaisir bien apparent. Il n’étoit pas moins pressant à demander du tabac, et en le prenant de la main gauche non paralisée, il le portoit constamment à la narine gauche seulement. Les parois de l’artère offroient peu de tension et la fièvre étoit modérée. On jugeoit à ses mouvements