Page:Desportes - Premières œuvres (éd. 1600) III - Cleonice. Dernières Amours.djvu/46

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  CLEONICE,  



LXVIII.


Que d’agreables feux, que de douceurs ameres
Retire en mon esprit,-ostre œil, mon beau vainql1eu~ !
Cypre, Paphos, Eryce, Amathonte et Cytheres
Ne logent tant d"amours que j’en ay dans le cœur.

Je veux mal aux destins, dont les loix adversaires
ll’ont si tard fait sentir vostre aimable rigueur ;
Le tans veseu devant ne m’estoit que langueur,
Et mes plus clairs objets des horreurs solitaires.

Acet heur maintenant bien que tard desUné,
Je me vante entre tous l’amant plus fortuné,
.Et pourveu que le sort ne rompe mes liesses,

Gardez pour vous le ciel, sainte troupe des dieux,
Beuvez voslre nectar, caressez vos deesses t
Mortel, je ne seray sur vctstre aise envieux.


LXIX


Ma belle et chere mort, pourquoy me tuez-vous,
Doutant contre raison de ma foy pure et sainte ?
Helas ! c’est moy, mon cœur, qui seul dois avoir crainte,
Quand je vois vos beautez adnMrables de tous.

Tant d’amours, tant d’attraits, rigoureusement doux,
Ce teint, ’ce ris, ce front où la grace est emprainte,
Et ces beaux nœuds chab.ïns, dont si ferme est l’ëtrainte,
Sont assez de sujets pour me rendre jaloux.

Laissez-moy oonc tout seul avaller ce bruvage,
Et croyez qu’en respritje n’ay que vostre image,
Je ]a sers, je l’adore, à toute heure, en tous lieux.