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  LIVRE II. 54



XXXI.


D'ou vient qu'une beauté, qui m'est toujours presente
Au coeur et en l'esprit, n'est presente â mes yeux?
Et comment fait le ciel, de mon aise envieux,
Que sans VOliS, ma douleur, tant d'angoisses je senle!

Plus je suis loin du feu, plus ma flamme est cuisante,
Et mes bouillans desirs plus chauds et furieux:
Et n'y a bois, rocher, DY distance de lieux,
Qui sene â me sauver d'ardeur si violante.

Tu peux luire â ton gré, soleil du firmament,
Pour les autres mortels, mais pour moy nullement:
lia nuiet dure tousjoun loin de l'oeil que j'adore,

Je voudroy que le ciel me permîst sommeiller,
Durant si longues nuicts qui cachent mon aurore,
Puis qu'apres son retour il me fist reveiller.


XXXII.


Junon, rOJlle des dieux, de courroux toute plaine,
Ainsi que le despit la faisoU enrager,
Alla jusqu'aux enfers les Fureurs déloger,
Allumant leurs brandons contre Inon la Thebaine.

Une deesse, helas t beaucoup plus inhumaine,
Sans descendre aux enfers pour de moi se vanger,
Me poursuit, me tounnente, et mon ame mal saine
Par cent et cent fureurs elle fait outrager.

La miserable Inon, d'Atbamas pourchassée,
Portaut son fils d'un bras, esperduë, insensée,
S'élança dans la mer et noya ses douleurs :

Et moy, de vos COUITOUX fuyant la violance,
Et portant sous le bras ma debile esperance,
Troublé, je me submerge en la mer de mes pleurs.