Page:Desrosiers - Âmes et paysages, 1922.djvu/100

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Mais, pas plus qu’autrefois, Marguerite ne s’abandonnait. Paul la soupçonnait de borner volontairement ses effusions ou d’être impuissante à se confier, ou de se méfier de lui. Il regardait ce front uni, se demandant quelles pensées, quelle vie sentimentale, quelles réflexions se dérobaient en arrière, à chaque minute. Sa physionomie ne lui livrait point son âme. Il avait l’impression d’être au bord d’une nuit profonde et de la sonder vainement pour découvrir les choses qui se dessinaient dans le lointain. Elle se montrait plus aimable et plus douce.

Paul lui apportait des livres en abondance ; et le goût de Marguerite pour la lecture n’était pas aussi constant que la volonté qu’il avait de lui en procurer. C’était alors l’époque de la pyrogravure. Adroit de ses mains Paul l’accablait de cadeaux à l’en embarrasser. Sur des boîtes d’érable couleur de miel d’automne il gravait, avec la pointe d’acier rouge, les lettres de son nom entrelacées à des arabesques. Il sculptait des paysages sur des coffrets, dessinait des fleurs et des devises sur des pièces de velours épais, s’ingéniait à trouver toujours des motifs plaisants et nouveaux.