Page:Desrosiers - Âmes et paysages, 1922.djvu/112

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de tempérament chez lui et chez moi m’a permis de le pénétrer parfaitement.

Jean Desbois, durant son enfance, avait été extrêmement débile et nerveux. Ses parents l’avaient un peu laissé à lui-même, désœuvré et solitaire, dans une campagne éloignée où il avait appris à sentir la caresse physique des vents et ce trouble qu’apporte en nos nerfs les changements de saison. Plus tard, au cours de ses aventures d’ingénieur-forestier, il avait vagabondé au milieu de cette zone de forêts épaisses qui enclave de sa masse sombre la mince bande de nos terres cultivées. Alors il s’était formé une sensibilité extraordinaire et il avait développé pour la nature un goût fort et vif qui le dominait. Les paysages dans sa vie avaient une importance primordiale et le plaisir d’en voir lui était devenu une nécessité.

D’abord l’avait frappé tout ce que notre pays renferme de tableaux et de scènes aux couleurs voyantes, éclatantes et crues. Les crépuscules occupaient la première place. Il en avait contemplé de simples : un immense brasier dont le foyer serait caché derrière l’écran noir et ondulé des montagnes, incendiant le ciel de toutes ses lueurs, illuminant de ses langues de feu tous les nuages, flamboyant