Page:Desrosiers - Âmes et paysages, 1922.djvu/113

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au-dessus des plaines de neige blanche ou de la mer d’un bleu indigo et opaque. Quelques-uns éclaboussaient l’horizon de leurs rejaillissements, drapaient des tentures pourpres, lançaient de longs rayons semblables à des lances écarlates et effilées ; d’autres laissaient flotter de légères écharpes et des gazes impalpables tandis que des troisièmes embrasaient de grands pans ou ne formaient qu’une mince ligne sanglante, comme une étroite ouverture que laisserait une fournaise géante au-dessus de sa porte. Dans l’automne il en avait admiré qui étaient blafards, livides et jaunes, et qui projetaient entre d’épaisses nuées une lumière douteuse alors que le vent roulait les feuilles mortes, par rafales haletantes ; il en avait admiré, trop lourds et trop chargés, angoissants et d’une splendeur barbare, aux soirs chauds et oppressants de l’été. Quelquefois un lac, un fleuve s’interposaient entre eux et lui, et le soleil dessinait alors dans l’eau tintée de grosses colonnes droites d’or brillant. Ou bien, complexes, magnifiques, mêlant comme sur une palette divine le mauve, le lilas, la violette, toutes les nuances du jaune, du bleu et du rouge, toutes les couleurs, non pas les couleurs des hommes, mortes et inanimées, mais les couleurs végé-