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croire un changement possible et même probable.

Lorsqu’il arrive à son bureau, tout le petit monde qui s’agite autour du parlement, fonctionnaires, secrétaires, huissiers, copistes et commis, s’entretient de l’événement. Des ministres, quelques députés veulent avoir une audience. Les journalistes affairés, insinuants, questionneurs, cherchent à se glisser jusqu’au premier ministre, à travers toutes les consignes, conduisent discrètement des enquêtes, cherchant une déclaration, une dénégation, un mot à emporter à la salle de rédaction. Les télégrammes s’empilent dans les mains du secrétaire particulier, et de minute en minute, le téléphone jette ses appels précipités et affolants dans le brouhaha et le tumulte de l’antichambre.

Pierre Langelier regarde lentement tout son bureau, le tapis vert, l’ameublement de noyer, les cadres suspendus et les deux bibliothèques où s’alignent, sur les rayons, les dos noirs et épais des statuts.

Son cerveau est d’une lucidité extraordinaire. Il voit pleinement que si, à la prochaine élection le parti n’est pas aligné en arrière de Jean Dorion, et que s’il ne passe pas pour avoir volontairement abandonné son