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Page:Desrosiers - Âmes et paysages, 1922.djvu/177

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taillée pour le déploiement des ailes illimitées des rêves. Tout ce pays dilate et enfle son énergie, l’emplit d’une indestructible volonté, car il est formé pour le songe des géants. Et Gaston sent s’éveiller en lui la ténacité sans bornes, indomptable, triomphatrice et farouche, un désir planté jusqu’au fond de lui-même de vaincre la vie, de se vaincre lui-même et de tout emporter d’assaut.

Il marche dans la nuit silencieuse et sonore, goûtant avec autant de bonheur qu’un fiévreux la fraîcheur de l’air. Il souffre et est envahi d’un malaise. Il cherche une discipline et l’on détruit toute discipline ; il cherche des règles et on les méprise ; il veut que son intelligence soit ordonnée et docile afin d’augmenter sa puissance et l’on déprécie l’ordre ; il veut des modèles sûrs et les iconoclastes brisent toutes les idoles. Ses certitudes sont ébranlées et ses convictions intimes s’entrechoquent ainsi que de vieux arbres squelettiques sous un ouragan d’hiver.

Durant les jours qui suivent Gaston tente de recouvrir sa sérénité, et la paix des efforts accomplis avec joie. Mais les mauvais fruits ont souvent un goût de corruption délicieux aux goûts mal formés. Il est engagé, et presque malgré lui, dans des nouveaux milieux