Page:Desrosiers - Âmes et paysages, 1922.djvu/53

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naissance, M. Prosper ! s’écrie une belle voix musicale et douce.

— Veuillez croire que tout le plaisir est pour moi, répond l’interpellé, et il serre la main qui se tend vers lui avec une courtoisie, une franchise, une grâce féminine admirable. Prosper lève le regard, rien qu’un petit peu. Mais quels yeux il voit, mes chers amis ! De beaux grands yeux noirs, des cheveux qui s’échappent de sous un chapeau à larges bords, en boucles endiablées et polissonnes, des joues roses, une belle peau blanche et veloutée. Graziella, car elle répond à ce nom gracieux et caressant, possède tous ces attraits, outre qu’elle le domine de toute la tête et qu’elle est plantureuse à ravir nos ancêtres de l’âge de pierre.

Quelle étrange fille c’était que cette Graziella ! Au bout de quelques jours elle avait pris l’air de la boutique et déployait toutes ses qualités. Il fallait la voir, à l’heure de la houpette, lorsque ces demoiselles, en face du conseiller des grâces, arment leur beauté de pied en cap pour les conquêtes de la rue. Elle emplissait le bureau du flot intarissable de ses paroles, pressées, incessantes, rapides, tombant en cascades, de son rire, un rire roucoulant, sonore, riche et volumineux de contralto,