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profond, au sein de vallons qui ne nous laissaient voir du firmament qu’un large cercle étoilé. Et, en face du panorama des collines basses, vieilles, lumineuses et douces, nous passions des heures sur des rochers élevés par les nuits de pleine lune, aussi immobiles que des sphinx et émus par la beauté des choses et leur grandeur.

Par les jours d’orage, c’était le repos sous la tente de toile à écouter la pluie chantante et chaude tomber sur les feuillages dans un brouillard blanc. Et quelquefois, s’arrondissant ainsi qu’un halo, un arc-en-ciel coiffait un mont ou dessinait une arche de pont multicolore entre deux sommets.

Dans les terrains dévastés par les feux de forêts, des arbres calcinés, noirs et nus se dressaient sur des crépuscules d’une rougeur de cuivre. Ou bien la lumière horizontale du soleil couchant, baignait tout un horizon de dômes, de pythons pointus et brisés, ou se précipitait, poussiéreuse et dorée, dans un ravin, comme à travers une écluse ouverte.

Cette année-là nous avions choisi, pour centre de nos opérations, le petit village de Bellerive, sur le côté nord du lac Nominingue. La voie ferrée des Laurentides venait à peine d’être construite, et tant d’endroits plus rap-