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bare qui ne soit capable de reconnaître et honorer son Dieu ».

Des délibérations importantes se poursuivent alors autour du magasin. Champlain mande les Jésuites. On discute en commun les moyens de fonder ce grand œuvre. Et la « conclusion du conseil fut que le Père Brébeuf leur dit en leur langue que nous allons avec eux pour y vivre et mourir ; qu’ils seraient nos frères, que dorénavant nous serions de leur nation ».

Tout s’arrange après de fastidieux débats sur les problèmes secondaires : choix du bourg ou des bourgs où les Pères résideront en Huronie, individus qui les transporteront. Enfin, on décide que les Jésuites construiront leur résidence dans un village surnommé La Rochelle, bourgade importante, « l’une des plus grandes et des plus peuplées de cette nation ».

Enfin, les Jésuites respirent : tout est décidé. Le Père Le Jeune quitte Notre-Dame des Anges avec les trois religieux qui doivent s’éloigner le lendemain sous la direction du Père de Brébeuf ; les bagages sont déjà distribués et reposent dans les canots ; la nuit tombe sur ces espérances.

Mais voilà qu’un sauvage de la Petite-Nation, tribu à laquelle appartient le meurtrier, parcourt les tentes en semant sur son passage la rumeur d’un événement important : parents et alliés du prisonnier attendent, paraît-il, les Français au passage, et ils mettront à mort tous ceux qui s’embarqueront avec les Hurons. Le Père de Brébeuf ne dort pas : il entend et comprend toutes ces paroles. Il communique aussitôt la nouvelle au Père Le Jeune. Celui-ci se lève en hâte : « Je m’en allai, dit-il, avec le Père De Nouë, au fort, pour en donner avis au sieur de Champlain. Nous étions couchés dans le magasin des Français à l’entour duquel étaient cabannés les Sauvages ». Des groupes se forment dans la nuit et discutent cette nouvelle. Tout de suite, un interprète circule de wigwam en wigwam et réclame un autre conseil avant qu’une décision définitive soit arrêtée.