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IROQUOISIE

« Tous ceux, dit la Relation, qui ont été destinés pour les Bourgs où nous avons des résidences, ou pour les voisins, ont été, grâces à Dieu, instruits et baptisés, et presque pas un sans des rencontres si particulières, qu’il y a sujet de croire qu’il y avait en leur fait quelque conduite spéciale de la divine Providence… »[1]. Le père Jérôme Lalement décrit d’une façon particulière les tortures du capitaine des Onneyouts, « nation d’Iroquois », le fameux Pierre. Les Hurons l’attachent sur un échafaud en face de l’un de ses compagnons ; il assiste d’abord à la mort rapide de cet homme « par l’application des flammes, des tisons et des fers ardents, avec des façons cruelles au delà de tout ce qui s’en peut écrire… »[2]. La furie désappointée des Hurons se tourne alors contre lui. Il a déjà subi les mêmes tortures que son compagnon. Il est maintenant scalpé. Alors, il perd connaissance. Mais se relevant soudain, il saisit avec ses mains estropiées un morceau de bois en feu. Les Hurons l’attaquent en poussant des clameurs. Il se défend avec énergie, il abat les échelles qui permettaient aux ennemis de monter sur l’échafaud, il darde son arme contre tout assaillant. Aucune pitié ne naît devant son corps couvert de brûlures, ce crâne ensanglanté. Les assaillants lui lancent des charbons, des cendres rouges ; par les fentes dans le plancher, ils glissent des branches en feu. Il se défend longtemps ; mais soudain, un faux pas, et il tombe sur le sol. Les Hurons se précipitent sur leur victime, la terrassent et ils la lancent dans l’un des brasiers. L’Iroquois se relève du milieu des flammes, et deux brandons dans les mains, il attaque la foule qu’il force à reculer ; il court vers la bourgade qu’il pourrait livrer aux flammes. Mais après avoir couvert la distance d’une centaine de pas, il trébuche sur un morceau de bois qu’on lui a lancé. Aussitôt, la foule furieuse l’accable. Elle lui coupe les pieds et les mains. Des bourreaux se saisissent de ce corps tronçonné, le tournent et retournent sur neuf brasiers en pleine activité. Enfin, le déposant au milieu du dernier, ils placent par-dessus le tronc d’un arbre presque tout

  1. Idem, 1639-67.
  2. Idem, 1639-67.