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IROQUOISIE

commet une faute terrible qui, après les trois épidémies, sera la cause de sa ruine finale.

Sans tenir compte, en effet, de la déperdition de forces qu’ils viennent de subir, les Hurons brisent, en toute connaissance de cause, le traité de paix qu’ils avaient conclu avec les Tsonnontouans, cinq ans plus tôt, en 1634. Depuis cette dernière date, ils n’avaient plus qu’à se défendre contre les quatre autres tribus iroquoises, c’est-à-dire contre des adversaires lointains, peu unifiés, plus faibles, incapables de leur faire beaucoup de mal. Mais les Tsonnontouans sont rapprochés. C’est la tribu iroquoise la plus puissante. Leur inimitié est dangereuse.

La guerre éclate de la façon suivante. « La jeunesse », comme disent les peuples indiens, c’est-à-dire les jeunes guerriers, ou le parti militaire comme on dirait aujourd’hui, se laisse entraîner à tuer en 1638 quelque Tsonnontouans rencontrés par hasard. Comment résister à l’impulsion soudaine de massacrer ? Ce premier accroc au traité n’est pas irréparable. Une négociation bien conduite, accompagnée des présents d’usage, pourrait probablement apaiser la tribu. Mais ces meurtres font sourdre dans la mémoire des Hurons, le souvenir « de ceux de leurs parents qui autrefois ont été maltraités par ces peuples… »[1]. La soif du sang s’éveille. Une rafale de vieilles rancunes souffle et décide « tout le pays à reprendre la guerre contre eux (les Iroquois), et les attaquer, plutôt qu’à réparer la faute »[2].

Une première expédition de guerre se met donc en route peu après. Elle remporte quelques succès. Les Missionnaires baptiseront « onze prisonniers de guerre, de douze qui furent amenés au pays sur la fin du mois de mai de cette présente année »[3]. Presque tous font montre dans les tourments d’une constance remarquable. Les Relations parlent en particulier de l’un d’eux : « L’espace des deux premières heures de la nuit qu’il fut tourmenté de toutes les façons, avec tisons ardents, haches brûlantes et autres ferrements tout en feu qu’on lui appliquait partout, il ne branla ni remua non plus que s’il eût

  1. RDJ, 1639-77.
  2. Idem, 1639-77.
  3. Idem, 1639-76.