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CHAPITRE XVIII


(1644)

Les nouvelles de Huronie ne sont pas rassurantes.

Les flottilles qui viennent à la traite se heurtent à un blocus serré. « Et l’an passé, dit le père Jérôme Lalemant, trois autres flottes, la plupart des chrétiens. trouvèrent aussi sur le même chemin, ou la mort ou la captivité, les uns dès leur départ des Trois-Rivières, les autres un peu au-dessous de Ville-Marie, les derniers environ soixante lieues plus haut ; car le péril continue cent lieues de chemin, n’y ayant pas un seul moment où on puisse être en assurance d’un ennemi caché dedans des joncs qui bordent la rivière, ou dans l’épaisseur des forêts qui les couvrent à notre vue, lorsqu’ils vous voient venir de quatre, cinq ou six lieues, ayant tout le loisir de se disposer au combat, s’ils vous voient les plus faibles ; ou de songer à leur retraite, ou demeurer cachés dans leurs embûches s’ils vous croient les plus forts »[1].

Le père Jérôme Lalemant habite la Huronie depuis sept ans ; il abandonne maintenant la direction des missions au père Paul Ragueneau. Avant son départ, il dresse le 15 mai 1645, le bilan de cette période. Il parle d’abord des épidémies qui « se sont suivies les unes après les autres »[2], et qui ont particulièrement décimé les convertis ; des famines et ensuite des guerres qui ont emporté de nombreuses victimes. Ces pertes sont très sensibles « pour tous ces pays qui vont s’affaiblissant de jour en jour, et

  1. RDJ, 1645-39-40.
  2. Idem, 1645-39.