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IROQUOISIE

de ces visiteurs. Il entretient le feu vacillant de la paix. « Ces barbares regardaient les lieux où ils étaient venus en guerre, où ils avaient massacré des Français et des Algonquins, où ils avaient pris des prisonniers… »[1]. On leur demande ce que sont devenus les Montréalistes capturés. Ils donnent des réponses évasives. Un Algonquin qui s’est enfui, assure « qu’il les avait vu brûler tout vifs », avec des raffinements inouïs de cruauté.

Mais ces visites, la présence d’Agniers en Nouvelle-France, conduisent à des frictions. Les Iroquois sont parfois insolents ; l’un d’eux s’écrie : « Je voulais tuer des Algonquins, mais Onontio a arrêté ma colère… »[2]. Des bravades pareilles excitent les esprits. Un algonquin riposte un jour de la façon suivante : « … Il n’y a pas longtemps que l’ombre des Algonquins vous faisait peur, vous les méprisez maintenant, pour ce que leurs péchés les ont exterminés »[3].

Le huit janvier 1646, un Huron arrive à Québec ; il apporte les lettres de Montréal, de Richelieu, des Trois-Rivières. Les Agniers qui étaient demeurés en ce dernier endroit, sont maintenant repartis, dit-il ; un Algonquin ivre les a poursuivis : « … On n’avait pu empêcher que l’ivrogne ne donnât un coup de bâton à un Agnier qui s’en plaignit encore en partant »[4]. Les Algonquins avaient proposé d’user de force pour retenir ces gens ; à leur avis, ils étaient des otages précieux tant que Couture et ses compagnons ne seraient pas revenus. Mais les Jésuites n’avaient pas été du même avis ; ils avaient soutenu que ces Agniers étaient libres, et que le traité de paix ne paraissait pas rompu. Un Agnier est cependant demeuré aux Trois-Rivières.

Mais ce Huron raconte aussi une bien autre histoire. Il a accompagné pendant une partie du trajet les trois ou quatre Agniers qui ont quitté les Trois-Rivières. Et, dans un moment de confiance, ceux-ci « lui dirent le secret de leur pays savoir, qu’on n’y voulait point de paix avec les Atichasata (les Algonquins) »[5], mais seulement avec les Hurons

  1. Idem, 1646-35
  2. Idem, 1646-35
  3. Idem, 1646-44
  4. Journal des Jésuites, p. 26
  5. Idem, p. 27