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IROQUOISIE

ils ne connaissent pas les ustensiles de métal qui faciliteraient une cuisson complète.

Au premier abord, ces sauvages sont nerveux, remplis de méfiance, de curiosité. Ils observent quelques matelots qui descendent sur la grève. Puis, soudain sautant dans leurs canots, ils s’approchent des goélettes, les abordent, se hissent à bord, examinent tout avec soin. Les Français leur donnent des couteaux à lame de fer, des grains de verroterie. Les visiteurs sont si contents qu’ils dansent et chantent dans leurs embarcations.

Indiens et Européens se découvrent. L’homme néolithique se trouve soudain placé en face de l’homme de l’époque du fer. À une date mal déterminée des âges révolus, le premier, saisi d’une folie de migration, a quitté son habitat primitif. Dans sa pirogue, armé de son arc, de sa lance, de sa hache de pierre, muni du feu sacré dont il vient de découvrir les secrets, il descend ou remonte les rivières, il affronte les océans, il arpente les continents, laissant ici et là sur sa route des groupes qui enfoncent des racines, s’accroissent, forment vite des tribus puis des peuples. Mais il a atteint avant son départ tout le développement mental dont il est capable ; il promène partout son âme dure, cruelle, son intelligence fruste, son nomadisme invétéré.

La race que les Français viennent de découvrir a conservé des coutumes de l’âge paléolithique ; elle se peint le corps et la figure de couleurs vives comme le vermillon, le noir. De tous les métaux, elle ne connaît un peu que le cuivre. Elle se sert de la hache de pierre. Elle sait tisser des cordages rugueux, ouvrer l’ortie, le chanvre, la fibre de l’arbre. Dans la construction de ses habitations, elle n’emploie que les branches et l’écorce. Elle moule des poteries qui ne manquent pas d’élégance. Elle cultive le sol, mais ne s’attache en particulier qu’à quelques produits : le maïs, la citrouille, le tournesol. Elle n’a pas domestiqué d’animal. La roue, l’écriture lui sont inconnues. Parfois cependant, elle trace des dessins crus sur des