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je vais maintenant vous lire, ainsi que ma réponse.

Celle dernière lettre met le comble à tout, puisqu’on y commet l’inconcevable étourderie — c’est le mot, il n’y en a pas d’autre, quoiqu’il s’agisse d’un Cardinal — de me reprocher de ne m’être pas soumis à une décision que l’on sait bien n’avoir pas voulu donner, parce qu’on ne pouvait la donner qu’en condamnant l’Évèque qui veut faire ici ce qu’on ne fait nulle part ; et aussi parceque, quoique l’on admit privément ses torts, on voulait faire croire au public que c’étaient nous seuls qui avions tort. Voilà comme un appel à Rome peut quelquefois se résumer en une pure et complète mystification à l’adresse de ceux qui y vont demander justice ! Si l’intérêt de la domination hiérarchique l’exige, on envoie se promener la justice, et l’on ruse avec les faits pour débarrasser les supérieurs de leurs torts et en affubler loyalement ceux que l’on n’a pas osé condamner sur la seule et vraie question portée à Rome.

Voici donc la lettre du Cardinal Barnabo. (traduite de l’italien.)


R. P. D. Francisco Baillargeon.
Archevêque de Québec.


Très Illustre et Révérend Monsieur,

Une congrégation de la Sainte et Souveraine Inquisition, tenue le 13 Août dernier, ayant considéré la longue et importune question relative à l’Institut Canadien, a cru devoir me donner instruction de vous communiquer ce qui suit :

D’abord, la dite congrégation a décidé qu’après en avoir référé aux Évêques de Montréal et des Trois-Rivières, (auparavant d’Anthédon) vous signifiez nettement à M. Dessaulles que sa manière d’agir ne peut en aucune manière être approuvée. Car alors qu’il en appelait au St. Siège sur des plaintes plusieurs fois exprimées contre les ordonnances de son Évêque propre, se déclarant prêt à recevoir avec respect les ordres du St. Siège, il a néanmoins inséré dans un certain annuaire certains écrits qui sont en contradiction manifeste avec sa déclaration et ses promesses. Car le dit annuaire fourmille de telles erreurs qu’il a été jugé qu’il devait être défendu tant par le droit que sur son propre mérite.

Il sera aussi de votre devoir, très illustre et révérend Monsieur, de déclarer au dit Dessaulles que par cette communication que vous allez lui faire, le St. Siège entend que la question sur laquelle il en a appelé soit regardée comme définie pour toujours.

Et si nonobstant cette déclaration, il veut encore porter ici des plaintes à propos de la même affaire, avertissez-le que le St. Siège n’y fera aucune attention et qu’on ne lui donnera aucune réponse.

Veuillez de plus lui signifier que s’il écrit de nouveau sur les mêmes sujets, ou sur d’autres de la même teneur qu’il a rendus publics, et s’il a la hardiesse de faire imprimer ces choses, vous lui refuserez toute réponse sur cette question déjà décidée par le Siège apostolique.

Enfin faites savoir au dit Dessaulles que le St Siège est persuadé que l’Institut Canadien, tant à cause des matières que l’on y traite que des principes que l’on y exprime, principes qui méritent une entière réprobation, a renoncé au but primitif de sa fondation.

Ayant informé Votre Grandeur de ces choses, je demande à Dieu d’assurer son bonheur.


À Rome, au bureau de la

sacrée congrégation

de la Propagande, le

23 Septembre 1870.


Signé : Al. C. Barnabo,
Préfet
Contre-signé : Joannes Simeoni,
Secrétaire.
Pour vraie corie : F. P. Têtu,
Sous-secrétaire.