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pagnie et les soins adoucissaient un peu ses malheurs ! L’Inquisition savait appliquer la torture à l’âme avec autant d’effet qu’au corps !

Tous les auteurs s’accordent à dire que son procès l’avait vieilli de vingt ans et qu’à Arcetri il était accablé d’infirmités. Il est à regretter qu’ils ne nous aient pas laissé quelques détails sur ces infirmités, car ces détails eussent pu fournir la preuve certaine de l’application de la question.

En 1637 il eut le malheur de perdre la vue. Voici comment le noble martyr s’exprime à ce sujet, dans une lettre à Diodati, en date du 2 janvier 1638 :

« Ce Ciel, ce monde, cet univers, que par mes observations, et mes évidentes démonstrations (voyez combien l’abjuration était réelle), j’ai agrandi cent et cent mille fois au-delà de ce qu’avaient cru les savants de tous les siècles passés, sont maintenant si restreints, si diminués pour moi, qu’ils ne s’étendent pas au-delà de l’espace occupé par ma personne. »

« La mélancolie me ronge, » dit-il un peu plus loin, « une immense tristesse m’accable. »

Et, en effet, quels ne devaient pas être le chagrin, la tristesse, l’abattement qu’ont dû produire chez ce grand homme la barbarie et l’acharnement de ses persécuteurs ! Quelles colères intimes n’ont pas dû se faire jour, dans cet esprit qui connaissait sa force et auquel on interdisait d’en faire usage !

Néanmoins il y avait tant de puissance dans cette intelligence hors ligne, tant de vitalité dans ce génie, tant de pouvoir, de réaction dans cette nature d’élite, que c’est pendant les neuf années qu’il passa à Arcetri, qu’il composa ses meilleurs ouvrages, et en particulier ces Discours et démonstrations mathématiques que Lagrange disait ne pouvoir venir que d’un génie extraordinaire.

Que n’eût pas fait ce génie si, au lieu de l’humilier, de le séquestrer, de lui fermer son domaine, l’enseignement et la presse, on lui eut laissé toute latitude, toute liberté d’action ; si on l’eut applaudi pour ses découvertes, honoré pour ses travaux, encouragé dans ses recherches ?

« C’est du temps de sa réclusion à Arcetri, » dit M. Arago, « que datent les plus profondes publications de Galilée. La perte de la vue semblait avoir augmenté la