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citoyens ! Quand il ne maltraitait que les membres de l’Institut, nombre de gens s’en inquiétaient assez peu, ne se donnant pas la peine de songer que l’écrasement de l’un aujourd’hui signifie l’écrasement de l’autre demain sous d’autres prétextes. Mais à présent que Sa Grandeur s’est aveuglément entêtée dans la lutte acharnée dont nous sommes témoins contre l’Archevêque, on commence à comprendre que l’invincible obstination de caractère qui la distingue est au fond de la plupart des luttes qu’elle a suscitées et des déboires qu’elle s’est attirés.

Non ! Sa Grandeur n’est pas plus sincère dans sa tactique contre l’Archevêque qu’elle l’a été dans sa tactique contre l’Institut. Elle dit dans sa lettre ces choses qu’elle ne peut pas croire exactes ! Elle défend des feuilles qui sont coupables d’écarts qu’Elle ne peut pas croire légitimes. Si je croyais que c’est l’Archevêque qui manque de sincérité, dans la grande lutte actuelle, je le dirais également ; mais il est des choses qui crèvent les yeux.

Comment, par exemple, Sa Grandeur peut-elle dire sincèrement : « J’ai demandé que l’on examinât ces journaux, (le Nouveau Monde et le Franc Parleur) avec toute la sévérité requise, protestant que si l’on y découvrait quelque chose de contraire… aux saintes règles de la charité et de la justice, tout serait réparé publiquement et dans le plus petit détail. »

Voilà les paroles, les protestations de bouche ; quels sont les faits !

Le Franc Parleur permet à un correspondant — que l’on assure être prêtre — de parler de la fourberie grecque de l’Archevêque ; à un autre de décrire sa supériorité arrogante, son froid dédain mal déguisé pour toute autre supériorité, son odieuse et basse jalousie de toute autre grandeur que la sienne, et aussi l’effronterie avec laquelle il trompe les autres !  ! Franchement était-il bien nécessaire d’aller s’enquérir à Rome même s’il y avait dans ces insultes de feuilles religieuses à un Archevêque quelque chose de contraire aux saintes règles de la justice et de la charité ? Quoi ! S. G. n’a pas pu apercevoir des insultes qui ont scandalisé tous les catholiques, quand elle découvrait chez moi des blasphèmes là où il n’y en avait pas trace !  !

Le même Franc-Parleur permet à un autre correspondant de louer l’habileté avec laquelle l’Évêque d’Ottawa sait nager entre deux eaux, vrai loose fish haut canadien sachant ménager la chèvre et le chou, et qui fait involontairement songer au renard rusé et au loup traître et sournois qui peuplent son voisinage !  ! Eh bien, pour que Sa Grandeur voie là des insultes à son collègue d’Ottawa, il faut qu’on lui apprenne de Rome que ce sont bien des insultes ! Sans cela Elle ne s’en douterait pas !  !

Je trouve encore dans la même feuille la description détaillée de l’air pompeux et gourmé de la Grandeur de St. hyacinthe, qui se tourne gauchement de droite à gauche, probablement pour nous débiter sa lourde phraséologie… Encore ici S. G. ne voit pas la plus petite médisance à l’adresse de son collègue !  !

La même feuille nous informe encore qu’à l’université Laval, on développe de mauvais germes chez les jeunes gens ; que cet établissement, exclusivement dirigé par des prêtres sous la surveillance immédiate de l’Archevêque, n’a de catholique que le nom ; qu’on y fait de la science sans Dieu[1] et qu’elle procède en véritable université athée. Je ne vois pas trop ce que l’on peut dire de plus injurieux que cela à un établissement dirigé par des prêtres. Eh bien S. G. ne le saura que si on le lui dit à Rome même !  !

Encore une fois, voilà l’homme qui se permet de jeter du louche sur la sincérité d’autrui ! Comment appeler cela de son vrai nom sans sortir des limites permises à la discussion publique ? Et rappelons-nous que S. G. elle-

  1. Je pourrais bien m’arrêter un peu ici sur ce mot science sans Dieu que tant de personnes emploient sans s’en rendre compte : mais je discuterai cette question une autre fois quand je traiterai un sujet d’où elle découlera naturellement. Il ne s’agit maintenant que de l’appréciation de la guerre ecclésiastique.