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Ce document, produit au Greffe de la Cour Supérieure à Montréal, le 13 Février 1873, et entré et endossé sous le No 458, fut déposé devant les Juges en Chambre, et par eux pris en considération.

La lettre dont suit copie fit connaître à Sa Grandeur la réponse des Juges à sa Requête :


Montréal, 25 Février 1873.


Au Rév. M. J. O. Paré, Ptre,

Secrétaire, Évêché de
Montréal.


Monsieur,

Le Protonotaire a reçu du Juge président (Monsieur le Juge Johnson) le mémoire dont suit copie, avec ordre de le transmettre à Sa Grandeur Monseigneur de Montréal.

« Sir, you will have the goodness to signify to Sa Grandeur Monseigneur l’Évêque de Montréal, that the Judges of the Superior Court are unable to adjudicate upon his Petition of the tenth inst. fyled on the thirteenth, which concerns a subject of internal discipline of the Court as between the judges and their officer respecting which their Honors decline to entertain speculative remonstrances. »

Nous avons l’honneur d’être,
Monsieur
Vos très humbles serviteurs,
(Signé),
Hubert, Papineau et Honey,
P. C. S.


Voici la traduction de la note des Juges :

Vous aurez la bonté de signifier à Sa Grandeur Monseigneur l’Évêque de Montréal, que les Juges de la Cour Supérieure ne peuvent adjuger sur sa Requête du dix du courant produite le treize, qui a rapport à un sujet de discipline intérieure de la Cour entre les Juges et leur officier, et que leurs Honneurs ne peuvent prendre en considération des remontrances purement spéculatives.

La requête de S. G. et la réponse des juges sont dûment consignées aux régîtres de la Cour Supérieure.

Cette réponse des juges était clairement la seule qu’ils pussent faire. Quand des juges, après examen d’une loi et pour l’appliquer, ont approuvé une formule qui en exprime parfaitement et la lettre et l’esprit, comment viendraient-ils discuter avec un individu quelconque — aux yeux de la loi ou des Cours, l’Évêque est un individu comme les autres, n’ayant ni moins ni plus de droits qu’eux — comment, dis-je, viendraient-ils discuter avec un individu pour le convaincre que c’est lui et non pas eux, les juges, qui ne comprend pas la loi, qui lui donne une interprétation factice ou absurde, et qui réclame des choses inadmissibles ? Dans les affaires ordinaires, après les plaidoyers respectifs, la Cour décide, mais ne discute pas avec les parties. Et dans le cas qui nous occupe, celui d’une loi exceptionnelle qu’il a fallu passer pour mettre fin à une usurpation de l’Évèque et pour régulariser la position de nombreuses familles dont cette usurpation compromet gravement les droits ; quand les juges ont donné leur interprétation de la loi à l’officier chargé de l’exécuter, c’est faire preuve d’une grande audace dans ses prétentions que de venir affirmer aux juges qu’ils n’ont pas compris la loi et lui font dire ce qu’elle ne dit pas. Si les juges avaient pu discuter avec Mgr de Montréal, ils lui auraient fait passer un très mauvais quart d’heure en lui indiquant les prodigieuses méprises dans lesquelles il est tombé. Ils auraient pu lui rappeler que les juges n’ont pas de leçon à recevoir des Évêques ; que ce sont au contraire les Évêques qui ont besoin de leçons quand ils ne veulent pas obéir à la loi. Et quand un Évêque veut mettre la loi de côté, il faut bien lui remettre dans l’esprit l’idée que c’est la loi qui est souveraine et non les Évêques. Que la Législature décide que c’est le droit canon qui est la loi du pays, alors les juges seront bien forcés de décider d’après le droit canon, mais il est assez probable que nous attendrons longtemps ce bienheureux