Page:Dessaulles - La Grande Guerre ecclésiastique. La Comédie infernale et les noces d’or. La suprématie ecclésiastique sur l’ordre temporel, 1873.djvu/137

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 127 —

pelle cet ordre. Et c’est l’Évêque qui seul complique les difficultés par sa résistance au tribunal, qui s’en vient placidement dire aux juges : « Voyez vous comme vous compliquez les difficultés ? « Eh bien, il est pénible de le dire, mais je ne pense pas que jamais pareille impertinence se soit encore vue en Canada. Voilà un homme qui a complètement tort et sur le fait qu’il défigure sciemment et sur le droit qu’il outrage impunément parcequ’il est Évêque, et qui ose dire aux juges qui ont certainement raison, et qui sont dans leur rôle et leurs attributions en corrigeant sa faute : « C’est vous qui entravez la loi ! C’est vous seul qui serez cause que les intentions des Législateurs seront frustrées !  ! » Et pourquoi sont elles frustrées à l’heure qu’il est ? Parceque l’Évêque ne veut pas porter ses régîtres pour y faire mettre l’Entête que la loi exige, qui est approuvé par les juges, et qui est absolument conforme à la loi ! Toujours le même système d’odieux travestissement des faits ! Toujours cette aveugle opiniâtreté qui ne recule devant aucune violence à la vérité, à la bonne foi et à la conscience pour ne pas céder ! J’ai tort, et rien ne me fera dire que vous avez raison. » Voilà encore une fois comment le Diocèse est gouverné depuis trente ans.

Qu’est ce que les juges feraient à un officier laïc de l’état civil qui oserait défier ainsi et la loi et le plus simple bon sens, et viendrait dire à un tribunal : « C’est vous qui frustrez l’intention de la loi en l’appliquant ; et c’est moi qui ne la frustre pas en résistant ! On logerait certainement mon homme en prison, pour mépris de Cour, et on le condamnerait probablement à une forte amende pour mettre ainsi en péril les droits individuels et les fortunes des familles. Mais c’est un Évêque qui se moque ouvertement de la Législature et des juges, et on va le laisser braver la loi. L’Évêque est au-dessus de la loi, et si les fortunes privées continuent d’être gravement compromises par son acte, tant pis pour les individus qui seront ruinés parce que la loi n’ose pas s’affirmer comme elle le devrait. Il faudra pourtant tôt ou tard que la suprématie de la loi soit maintenue.

Voilà où nous en sommes pour avoir laissé depuis dix ans le camp ultramontain affirmer arrogamment sa suprématie et la sujétion entière des gouvernements au Syllabus. Cette suprématie n’est basée que sur des faux historiques, des pièces fausses comme la donation de Constantin et les fausses décrétales ; et les journaux religieux, qui ont cru pendant longtemps en être arrivés à faire taire ici toute opinion indépendante, n’ont fait depuis dix ans que tromper le public en lui affirmant constamment comme vraies des choses qu’ils savaient n’être pas vraies. Il était temps que quelqu’un vint démontrer leur mauvaise foi et leur passion de dominer, et je l’ai fait sachant bien à quelles haines et à quelles injures je m’expose.

Heureusement les injures m’affectent peu, et j’ai assez étudié les sujets que je traite pour voir que mes adversaires ou ne les ont pas étudiés, ou les défigurent en toute préméditation quand ils l’ont fait. Je suis prêt à leur montrer cela où, quand et comment ils le voudront. Je n’ai encore fait qu’effleurer le sujet, et je suis loin de les avoir montrés tels que l’histoire vraie les fait.

Non ! tant que le Clergé aura n’importe quelle fonction civile à remplir, il cherchera à l’excéder et à empiéter sur le droit de l’état. L’Église seule nous dit-on, peut déterminer ce qui est son droit. L’état n’aura donc que ce qu’elle voudra bien lui laisser. Et elle couvrira ses plus impardonnables exactions comme ses plus insoutenables immunités d’un prétendu droit divin inventé pour l’occasion. Le Concile de Bamberg, à la fin du 15me siècle, avait déclaré de droit divin l’exemption des ecclésiastiques de payer un sou pour traverser un pont. Le collecteur et le propriétaire étaient excommuniés s’ils réclamaient ce sou. Voilà les hommes qui ont seuls le droit de définir les droits des états et des individus ! Mais ceci est un exemple du 15me siècle, et nos savants défenseurs