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sonnel et mousser leurs petites combinaisons ambitieuses ; mais ils savent parfaitement que tout en flattant le Clergé dans ses convoitises de suprématie sur le temporel, les lois si libéralement offertes n’en passeront pas d’avantage. Plusieurs même combattraient demain ce qu’ils offrent aujourd’hui de bouche s’ils voyaient le moindre danger qu’on l’obtînt. Tant qu’il n’existe pas, ils font leurs petites affaires d’ambition en offrant avec une libéralité infinie aux dépens d’autrui tout ce que le Clergé pourrait désirer. Il en coûte si peu d’offrir pour se faire donner des bonnes notes, et avec la parfaite certitude que l’offre ne peut être suivie d’exécution ! Je ne comprends pas que le Clergé ne voie pas cela ! Et pourtant voilà déjà plusieurs questions sur lesquelles ceux qui avaient tant promis n’ont rien tenu ! Ils ont vécu de la confiance du Clergé, et la seule force des choses les a rejetés dans une autre direction quand le Clergé a eu besoin d’eux !

Il n’existe pas un homme digne d’entrer dans un gouvernement qui consentirait à recevoir sa direction des membres des congrégations romaines, dont quelques unes sont si décriées par leur arrêts ou par les opinions ou les décisions qu’elles ont émises à différentes époques. Il ne faut pas avoir étudié beaucoup, Mgr, pour pouvoir citer une centaine de décisions de congrégations romaines qui ferait rire même le Clergé aujourd’hui. Si l’on ne sait pas cela en Canada, c’est que personne n’étudie ces sujets. Mais s’il fallait citer des faits, j’en ai un magasin, et sans avoir puisé chez les impies ou les ennemis. Et je les ai collectés et réunis parce que je vois clairement depuis vingt ans que tôt ou tard il faudra faire face avec énergie aux envahissements préparés de longue main de l’ultramontanisme, et le peindre par lui-même pour le faire connaître tel qu’il est. Presque tous ceux qui le représentent dans la presse portent un masque ; ne disent pas ce qu’ils savent quand ils ont étudié, ou sont ignorants quand ils croient ce qu’ils disent.

Et puis, Mgr, les voyageurs instruits qui vont à Rome et qui causent droit public avec les membres si vantés ici des congrégations romaines, sont tout stupéfaits de leur inaptitude à saisir les plus simples questions de droit politique ; de les voir si neufs sur tout le droit moderne et si arriérés, je dirais presque si rouillés, sur les questions économiques ou d’administration les plus ordinaires. Et où auraient-ils pu apprendre ces choses ? Ils ne lisent rien de ce qui se publie en Europe depuis cinquante ans et ils l’ont presque tous en horreur ! Ils peuvent être très forts sur les livres et les sujets qu’ils ont étudiés, mais ils ont malheureusement étudié précisément ce qui les a éloignés du mouvement actuel des idées. Est-ce dans St. Thomas qu’ils ont pu trouver la solution, ou l’examen, des questions sociales, économiques ou industrielles qui ont surgi quatre siècles après lui ? Évidemment, Mgr il faut de deux choses l’une : ou être de son époque ou ne pas chercher à la régir.

Non ! Mgr il faut renoncer à cette irréalisable idée de faire contrôler notre législation ou notre politique intérieure par les théologiens de Rome ou par les Évêques du pays. Des fourbes peuvent faire semblant de se montrer disposés à le permettre, mais personne n’y songe sérieusement, et trop souvent ce sont ceux-là qui le disent le plus qui le pensent le moins. Et toute la différence entre moi qui vous parle ainsi et ceux qui vous tiennent un autre langage, c’est que je vous dis franchement ce qui est, pendant que les autres ne disent pas ce qu’ils pensent. Ils trompent Vos Grandeurs, et quand ils disent oui, c’est pour se faire accepter du Clergé et se faire recommander au peuple, mais ils font non sous main et travaillent derrière le rideau en contre sens de leurs protestations. Et ce qui le prouve, c’est que quand ils vous ont flattés pendant vingt ans, ils vous abandonnent au moment critique, comme cela vient de se voir. Et c’est la seule force des choses qui les amène là. Ils ne peuvent pas faire ce qu’ils ont promis, et quand ils promet-