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provoque sont désastreuses. Mais malheureusement pour les peuples et pour eux mêmes, jamais les leçons de l’histoire n’ont arrêté les Clergés dans leur tactique de tous les temps d’essayer de mouler les institutions sociales sur le régime des collèges qu’ils dirigent. Aux yeux du prêtre, le fidèle doit être comme un enfant dans sa main, exactement comme le moine doit être un cadavre dans la main de son supérieur et « obéir jusqu’au péché mortel inclusivement. V. G. sait où trouver ce beau précepte de morale ecclésiastique.

V. G ayant donc réussi, par des moyens que j’ose regarder comme très douteux en conscience éclairée, à empêcher les journaux de parler de certaines choses que le Clergé n’aime pas à voir débattre en public parcequ’elles éclairent trop les esprits sur un passé que l’on voudrait effacer de l’histoire, et sur des prétentions qui ne soutiennent pas l’examen, il me faut bien m’adresser directement au principal auteur de ce mutisme imposé pour réclamer contre l’abaissement général des caractères que j’observe de plus en plus autour de moi et contre l’odieux système qui le produit. Comme les Évêques du Concile, je n’attends aucun résultat pratique de ma démarche. Je sais depuis trente ans que rien n’agit sur V. G. Je sais qu’Elle est le soldat discipliné de l’ultramontanisme, et qu’à ses yeux le premier devoir d’un catholique, même dans l’appréciation des choses temporelles, est de se dépouiller de la raison que Dieu lui a donnée pour ne s’en rapporter qu’au Pape. L’ultramontanisme a depuis plusieurs siècles cessé de tenir compte du Mundum tradidit disputationibus eorum. Je n’attends donc rien de ma démarche. Mais s’il me faut plus tard, pour raison de légitime défense, en venir à publier avec accompagnement de preuves les faits effroyables dont un si grand nombre de prêtres de ce pays se sont rendus coupables sur le chapitre de la moralité personnelle, l’autorité ecclésiastique ne pourra pas me reprocher de dévoiler tant de faits restés secrets sans l’avoir avertie de mes intentions. Je ne joue jamais que cartes sur table. Et quand je vois tant de prêtres indiscrets, et souvent immoraux, avoir recours à la calomnie en pleine église pour satisfaire un pur antagonisme politique, il me sera certainement permis de dire des choses vraies, quelque pénibles qu’elles soient, pour faire connaître au peuple du pays quel est le vrai calibre moral des calomniateurs. J’en ai déjà touché quelque chose dans ma lettre à M. le curé Rousselot à propos du honteux sermon prononcé dans la chaire de N.-D. en Octobre de l’année dernière, à l’addresse d’un mort illustre qui me touchait de près. J’ai indiqué là une très petite partie des choses que je pourrais prouver, et j’y renvoie V. G.

J’ai donc été informé, Mgr de différents points du pays, que cette année comme l’année dernière, comme en 67, comme en 63 et en 62, nombre de curés se sont permis les plus outrageantes remarques, les plus inexcusables attaques, en chaire, contre les candidats libéraux. Les expressions « rouges » « révolutionnaires, » « communistes, » « ennemis de tout ordre et de toute morale ; » « mauvais catholiques, » « impies, » « renégats, » « ennemis de Dieu et des hommes, » sont tombés de bien des chaires à l’adresse de mes amis politiques. Les ridicules assertions que voter pour un libéral c’était « se jeter tête baissée dans le péché mortel, et conséquemment se rendre indigne des sacrements et de sépulture ecclésiastique » ; c’était « insulter sa religion et renier Jésus-Christ, » ces ridicules assertions, dis-je, se sont produites dans bien des chaires de campagne. C’était aussi un péché mortel que de ne pas soutenir la politique des Évêques qui pourtant nous affirment qu’il n’en ont aucune. Et voilà comment des hommes qui se décorent du titre de pasteurs ravalent la religion au gré de leurs passions et de leur ignorance. Et que V. G. veuille bien ne pas trouver ce dernier mot déplacé et trop dur, car le prêtre même dont je parlais à l’instant nous apprend qu’une ignorance tout à fait déplorable règne chez les membres du Séminaire de Québec. L’assertion m’a