Page:Dessaulles - Lettres de Fadette, deuxième série, 1915.djvu/119

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crier après les bonheurs impossibles et à dédaigner les joies quotidiennes.

Ceux qui dénigrent la vie souffrent d’une infirmité morale qui les empêche de la voir sous tous ses aspects. Ils se mettent de niveau pour la regarder : le seul moyen d’en avoir une idée exacte, c’est de monter et de la regarder de haut.

Les plus grands aveugles ne sont pas ceux qui ne peuvent pas voir, mais ceux qui ne veulent pas voir. Les mécontents et les amers se plaisent surtout à se voir eux-mêmes : ils ne s’écartent jamais de leurs soucis, de leurs déceptions et de leurs rancunes. Ce n’est pas la vie cela ! C’est leur vie, la vie qu’ils se font, car, en mettant dans leur âme plus de douceur et plus d’énergie, ils la transformeraient totalement.

Se sont-ils déjà demandés, ces désappointés, ce qu’ils ont été dans la vie des autres, de ces autres qu’ils jugent avec tant de sévérité ?

Ils se disent négligés et mécontents, mais comment se sont-ils révélés à ceux qui ne les comprennent pas ?

Ils désirent rencontrer de la bienveillance, et de l’indulgence pour eux-mêmes : est-ce bien de cela qu’ils font preuve avec ceux qui les désappointent ?

Il me semble qu’à travers les âmes douces envers la vie, la lumière de la vérité pénètre, comme passent les rayons du soleil dans un ciel limpide, et quand elles sont bonnes pour