Page:Dessaulles - Lettres de Fadette, première série, 1914.djvu/63

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fera du bien ; je puis peut-être vous aider ?… — Personne peut m’aider, allez ! J’le porte tout seul, le crapaud ! —

Un soupçon traversa l’esprit de Madame X. — Dites donc, Luc, vous avez fait vos Pâques ? — La figure du vieux se contracta, il eut une hésitation et tout à coup, avec explosion : — Non, madame ! Des Pâques, j’en fais pas de pu… de pu… ben des années ! Et c’est ça qui me ronge, qui me dévore, parce que, vous le savez ben, ma chère petite dame, j’suis pas plus méchant qu’un aut’ ! — Je n’y comprends rien, mon pauvre Luc ; vous allez à la messe le dimanche et même la semaine quelquefois, et Adèle m’a dit que vous jeûniez tout le carême, et vous êtes si à votre devoir et bon, bon ! Pourquoi ne faites-vous pas vos Pâques ? — Bonnement parce que j’peux pas ! fait-il, têtu. — Dites-moi la raison, voulez-vous ?

Elle a des yeux caressants et doux auxquels le vieux Luc ne sut pas résister. — … Quand j’étais aux États, y a ben des années, je m’ai mis d’une société secrète, et les camarades m’ont dit : « Asteur, mon vieux, tu peux pu faire tes Pâques tant que t’en s’ras, et j’les zai pu faites, tonnerre ! — Mais que faisait-on dans cette société ? à quoi vous engagiez-vous ? — J’le sait-y moë ? J’m’en suit en r’venu icitte queuque mois après, mais j’ai jamais pu leu dire que j’voulais pu en être d’leu maudite société ! et j’en suis, j’en suit encore ! — Mais c’est