Page:Dessaulles - Lettres de Fadette, première série, 1914.djvu/75

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tu ressembler à ton père qui a fait mourir ta mère de chagrin ? »

En répétant ces mots, le petit se remit à pleurer et à travers ses sanglots. — Ce n’est pas vrai, dites, que mon père a été méchant pour maman ! Il était bon, bon pour moi, et je ne suis pas un méchant, non plus !

Je niai tout énergiquement ; j’assurai que la tante étant très fâchée avait dit plus que sa pensée, que je savais que son père était bon, que sa mère avait été heureuse, et que lui était bien un peu espiègle mais un brave petit homme qui ne penserait plus jamais à cette vilaine histoire.

Il m’écoutait avec des yeux navrés, une petite figure crispée qui faisait pitié. Ah ! le pauvre petit étourneau ! Voilà que la vie lui faisait bien mal déjà, et le blessait au plus vif : dans son culte pour la mémoire de son père. Oh ! la vilaine femme qui voulait tuer une seconde fois ce mort, je lui en voulais tant à ce moment que je la trouvais inexcusable !

Mais à la réflexion, je revis sa figure niaise, et je me souvins de sa bêtise : mais être bête à ce point, c’est peut-être pire que d’être méchant ! On ne se doute pas des chagrins désespérés que peuvent avoir les enfants ; on ne sait pas assez le mal qu’on leur fait en leur disant du mal des autres, surtout de leurs parents, et cette vieille folle, qui va à l’église quatre fois par jour, fera peut-être un mauvais sujet du bon petit cœur qui s’est révélé