VIII
L’âme de la race
Dans la classe aux murs blancs couverts
de tableaux noirs et de cartes géographiques,
trente petits Ontariens, de dix à douze ans,
écoutent de toutes leurs oreilles et de tous
leurs yeux la jeune fille qui vient de leur
expliquer l’immortalité de l’âme : « Donc
notre âme ne meurt pas, vous avez bien
compris cela ? Dans notre âme immortelle
humaine qui ne peut pas mourir, il y a,
chez chacun de nous, une autre âme, l’âme
de notre race qui ne doit pas mourir. Or,
je vous ai bien expliqué que l’âme, c’est notre
esprit, notre cœur, notre manière de penser,
et de sentir qui se manifestent dans notre
langage ; c’est cela qui est l’âme d’une race,
parce que c’est l’âme transmise de tous ceux
qui nous ont précédés dans le monde et
dont nous descendons directement : nos
pères et nos grands-pères. Si nous, les
Canadiens français, reculons très loin dans
le passé, de bisaïeul en trisaïeul, nous rejoignons
ceux qui partirent de France, il y a
plus ou moins longtemps, pour venir ici
défricher et peupler le Canada qui appartenait
alors au roi de France.
Et voilà pourquoi, mes petits, nous sommes français, pensant, parlant, sentant comme nos ancêtres français qui étaient honnêtes, braves, désintéressés, travailleurs, et dont nous devons être fiers.