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faisons-nous pas une injure grave à Dieu qui a fait la tendresse de nos cœurs humains, de Le soupçonner de dureté, de dureté éternelle ?

Et je n’ai plus été malheureuse. Nous comprendrons plus tard, quand pour nous aussi la porte s’ouvrira…


XL

La soldanelle


Il neige et je suis un peu paresseuse. Le silence est si grand, dehors et dedans, que j’entends le frolis des flocons de neige qui se pressent dans les vitres comme s’ils demandaient de leur ouvrir… c’est joli toute cette neige qui monte le long des pentes, s’arrondit en dôme sur les clôtures et les objets dont elle reproduit les formes en courbes si moelleuses ! Les branches sont garnies de moineaux : transis, le cou dans la plume, en petites boules noires, ils frissonnent dans la mousse blanche qui épaissit.

J’ai pris un livre que mes doigts effeuillent distraitement, pendant que je regarde dehors, toute au plaisir de flâner si doucement. Une fleur séchée glisse du livre sur ma main, et voilà que mes pensées qui se dispersaient comme la neige folle, commencent à vivre autour de cette activité faite fleur que l’on appelle la soldanelle. La vie de cette petite plante ressemble à un conte de fée par son côté merveilleux, et à un cours de morale par son côté profond.