Page:Dessaulles - Six lectures sur l'annexion du Canada aux États-Unis, 1851.djvu/21

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Voilà comme on n’y était pas réactionnaire ! Voilà comme on y comprenait les tendances morales évidentes des sociétés modernes !  !  ! Pour sa sainteté Grégoire xvi, Louis Philippe était un rouge !

Eh bien, Messieurs, quelle est la qualification qui convient à un gouvernement qui considérait comme son droit la proscription de la pensée, comme une de ses plus importantes occupations, la saisie des enveloppes salies et chiffonées des voyageurs ? Heureusement pour les peuples, ce despotisme abject et brutal ne sera pas encore longtemps possible !

« Les semences des idées nouvelles » dit M. Chateaubriand aux réactionnaires de toutes les époques et de tous les pays, « Les semences des idées nouvelles ont levé partout. Ce serait en vain qu’on les voudrait détruire. On pouvait cultiver la plante naissante ; la dégager de son venin ; lui faire porter un fruit salutaire ; il n’est donné à personne de l’arracher. Je n’ai cessé de répéter à de vieux gouvernements qui furent bons dans leur temps et qui eurent leur renommée, que force était pour eux de s’arrêter dans la monarchie constitutionnelle ou d’aller se perdre dans la République. »

Voilà l’avenir des nations clairement indiqué par un homme dont le génie peut bien faire contre-poids à toutes ces déplorables têtes qui ne voient que dans le despotisme moral et politique la loi immuable de l’humanité.

En effet, Messieurs, ne faut-il pas fermer exprès les yeux à la lumière ; ne faut-il pas être contradicteur par instinct ou par intérêt pour nier que l’ensemble des grands corps sociaux qui forment aujourd’hui le monde civilisé gravite uniformément vers la démocratie ?

Or, si telle est la tendance évidente et invariable de l’esprit humain partout où il n’est pas faussé par l’esprit de corps, ou par l’esprit de caste, ou par la corruption administrative, ou par la soif de suprématie temporelle de ce parti qui, avec un rabat pour égide, jette un cri de colère et de détresse à chaque conquête nouvelle de la civilisation moderne, pourquoi donc trouver si étrange qu’en Canada, comme partout ailleurs, on sente le besoin, on manifeste le désir de sortir de l’enfance politique, de jeter au loin les langes funestes dans lesquelles ce pays étouffe aujourd’hui ? Pourquoi donc trouver étrange que ceux qui, en Canada, n’ont pas perdu au souffle