Page:Destrée - Le Secret de Frédéric Marcinel, 1901.pdf/53

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uns parce qu’ils sont en retard, d’autres peut-être parce qu’ils sont en avance, d’autres enfin parce qu’ils sont en dehors, relativement à l’évolution de l’humanité. Ces êtres en révolte permanente contre nos conceptions et nos habitudes, il conviendrait d’abord de les connaître et de les discerner avec soin. Le procédé actuel est empirique et hasardeux. La récidive légale est infiniment trop restreinte en sa définition. Elle n’atteint point des gens qui sont des délinquants professionnels. D’autre part, les juges saisis du second fait n’étant point admis à s’inquiéter des conditions du premier peuvent se trouver obligés de classer comme récidiviste un occasionnel malchanceux.

Je suis convaincu qu’on ne fera rien d’utile, rien de sérieux, aussi longtemps qu’on n’aura point considéré la récidive comme un phénomène spécial, devant être régi, établi et jugé selon des règles spéciales.

Je voudrais, par exemple, que lorsqu’un individu aurait encouru un nombre de condamnations suffisant pour le faire présumer incorrigible, il fût déféré à une Cour de justice spécialement chargée d’examiner son cas. Cette juridiction serait composée de manière à présenter un maximum de garanties ; je voudrais voir son personnel incessamment renouvelé, choisi parmi les illustrations du barreau et de la magistrature. J’y voudrais voir des médecins et des sociologues. Elle aurait les pouvoirs d’enquête les plus étendus, avec la contradiction permanente ; elle pourrait scruter les antécédents, remettre en question les condamnations antérieures, se faire apporter les dossiers ; et elle serait investie de la redoutable mission d’apprécier et de décider, en tenant compte de toutes les circonstances de