Page:Destutt de Tracy - Élémens d’idéologie, troisième partie.djvu/203

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toutes nos autres perceptions. Mais cette contradiction apparente s’évanouit dès que l’on fait attention à nos observations sur l’imperfection de nos souvenirs. En effet, dès que nous portons un jugement sur une idée, dès que nous percevons un rapport entre cette idée et une autre, ce rapport y est actuellement par cela seul que nous l’y voyons ; cette perception existe actuellement par cela seul que nous l’avons, que nous la percevons. Ce jugement en lui-même est donc nécessairement et invinciblement juste, pris isolément. Mais cette idée qui nous donne cette perception de rapport, cette idée dont nous jugeons, nous la connoissions déjà, ne fût-ce que depuis un instant, puisque nous en jugeons. Elle est donc actuellement

un souvenir. Elle peut donc être un souvenir imparfait. Il se peut donc qu’elle n’ait jamais renfermé l’élément que nous y voyons actuellement, que non-seulement cet élément ne soit pas implicitement compris dans ceux qui la composaient jusqu’alors, mais même qu’il y répugne et qu’il leur soit contradictoire, et que parconséquent cette idée soit devenue actuellement pour nous une autre idée, sans que nous nous en appercevions. Alors notre tort n’est pas précisément d’y voir l’élément que