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Page:Destutt de Tracy - Élémens d’idéologie, troisième partie.djvu/267

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j’ai senti. Aussi Berkeley, qui est de tous les philosophes à moi connus, celui qui a soutenu avec le plus d’esprit cette singulière thèse, avoue, lorsqu’il croit l’avoir prouvée, qu’elle ne change rien du tout à l’ordre des choses. Il console son pauvre Hylas, qui se désespère de ce que le monde entier lui échappe ; et il l’assure que cela n’y fait rien du tout, et que tout va pour lui comme avant cette belle découverte. Effectivement si l’on consent à ce singulier principe, que ma simple vertu sentante peut en même tems vouloir et s’opposer, vouloir et ne vouloir pas la même chose, vouloir souffrir par exemple, ce qui me paraît bien pénible à accorder, le reste de la discussion est absolument vide de sens, et la dispute un pur jeu de mots. Car les êtres que nous appelons réels n’existent pour nous que par les perceptions qu’ils nous causent. Dans tous les cas, ces perceptions ne peuvent pas nous venir sans causes. Si leurs causes existent dans notre faculté sentante, elles ne nous sont connues de même que par ces perceptions. Elles n’existent pour nous, comme les êtres, que par ces perceptions ;