Page:Destutt de Tracy - Quels sont les moyens de fonder la morale chez un peuple ?.djvu/5

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chef permanent, qui attache sa fortune et sa gloire à la perfection de son service.

Ces dernières vérités sont communes à tout grand système d’administration quelconque ; et je pense qu’on doit les prendre pour règle inviolable toutes les fois qu’une forte crainte de l’abus du pouvoir et une juste inquiétude pour la liberté publique, ne contraignent pas impérieusement à s’en écarter. Alors sans doute il faut sacrifier une partie du bien-être présent au soin de l’avenir. Mais il restera toujours vrai que jamais un service public ne sera aussi bien fait lorsqu’il sera dirigé par une collection d’hommes nommés pour un terme court, que quand il dépendra d’un chef unique et permanent qui en fera son affaire personnelle ; et il est encore plus certain que dans tout établissement public le passage d’une manière d’être à une autre, même meilleure, est toujours un moment de crise où on éprouve tous les maux des deux régimes, et que si l’incertitude des individus sur leur sort se prolonge, il en résulte des désordres qui deviennent irrémédiables, si ce n’est par le temps ; preuve, qu’en fait d’amélioration on aurait plutôt fini en allant plus doucement.

Quant aux gardiens des maisons de détention, je n’ai qu’une chose à en dire : c’est qu’il faut être inflexible à leur égard, si leurs prisonniers leur échappent. Je pense qu’ils devraient faire partie du corps de la gendarmerie, et être soumis aux mêmes chefs. Arrêter et garder sont deux services du même genre. Ils doivent être régis d’après le même principe, savoir ; que le plus grand intérêt de la société est que nul malfaiteur ne puisse ni échapper, ni s’évader.