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Contes d’un buveur de bière

mais jure-moi que jamais tu n’en useras contre toi-même. »

Macaber le jura, prit la faux & s’en alla.


III


Le filleul de la Mort était naturellement bon & sensible, & le malheur ne l’avait point aigri. Il n’avait exigé la grande faux qu’en vue de faire du bien à ses semblables.

« Je faucherai, s’était-il dit, ceux qui demanderont à mourir, ou dont la vie sera à charge aux autres. Je ferai le bonheur du genre humain ; cela m’aidera à oublier mon malheur. »

Il ne tarda point à rencontrer, sur le bord d’un fossé, un vieux pauvre, perclus de tous ses membres & rongé par la vermine.

« Ô Mort ! quand viendras-tu me délivrer ? s’écriait le vagabond.

— Tout de suite ! » répondit Macaber, & d’un coup de faux il le délivra.

Mais l’âme ne fut point plus tôt séparée du corps, qu’elle murmura Coquin de sort ! mon corps se serait peut-être guéri, & qui sait si nous ne serions point devenus riches !