Page:Deulin - Contes d’un buveur de bière, 1868.djvu/245

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

239
Martin & Martine

Le lendemain, il s’éveilla fort tard & fut visiter la prisonnière. Il trouva la cage ouverte & l’oiseau envolé. Il demanda à sa femme ce qu’était devenue sa fille.

« Eſt-ce que vous me l’avez donné à garder ? » répondit celle-ci en haussant les épaules.

Il se douta que la mère & la fille étaient de connivence, mais comme il n’aimait point les querelles de ménage, il ne souffla mot & sortit pour dissiper sa colère.

En traversant la place, il avisa une foule de gens qui se tenaient le bec en l’air & les yeux fixés sur l’horloge. Il leva le nez comme les autres, & que vit-il ? Martine auprès de Martin.

Il fut pris d’un terrible accès de fureur. S’il avait eu sa canardière sous la main, nul doute qu’il n’eût descendu sa fille comme une sarcelle. Quand il put recouvrer la parole, il s’écria :

« Puisque la coquine se trouve bien là, qu’elle y reſte ! »

Et, sans vouloir entendre à rien, il commanda qu’on l’enchaînât de l’autre côté de la cloche.