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Page:Deulin - Contes d’un buveur de bière, 1868.djvu/93

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Le Petit Soldat

Peut-on l’allumer ? » comme c’eſt l’habitude. Personne ne répondit.

Jean frappa plus fort : rien ne bougea. Il haussa le loquet & entra. La salle était vide.

Le petit soldat alla droit à la cheminée, saisit les pincettes & se baissa pour choisir une braise, quand tout à coup, clic ! il entendit comme le bruit d’un ressort qui se débande, & un énorme serpent lui jaillit au nez du milieu des flammes.

Chose singulière ! ce serpent avait une tête de femme.

J’en sais plus d’un qui aurait pris ses jambes à son cou, mais le petit soldat était un vrai soldat. Il fit seulement un pas en arrière & porta la main sur la poignée de son sabre.

« Garde-toi de dégainer, dit le serpent. Je t’attendais, & c’eſt toi qui vas me délivrer.

— Qui êtes-vous ?

— Je m’appelle Ludovine, & suis la fille du roi des Pays-Bas. Tire-moi d’ici, je t’épouserai & je ferai ton bonheur. »

Si un serpent à tête de femme me proposait de faire mon bonheur, je demanderais à réfléchir ; mais le Rôtelot ne savait point que méfiance eſt mère de sûreté. D’ailleurs, Ludovine le regardait avec des yeux qui le fascinaient, comme s’il eût été une alouette.

C’étaient de très-beaux yeux verts, non pas