Page:Dick - Le Roi des étudiants, 1903.djvu/70

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Champfort était habitué à ces boutades et ne s’en étonnait plus.

Il se dirigea vers le piano et, jetant les yeux sur un cahier de musique ouvert en face :

« Du Schuybert ? fit-il… Est-ce cela que vous jouiez tout à l’heure, ma cousine ?

— Quoi, vous écoutiez, monsieur ?

— Non pas, j’arrivais et je n’ai pu commander à mes oreilles de ne pas entendre la ravissante musique qui jaillissait de vos doigts.

— Ravissante musique ! ricana Mlle Privat… Mon cher cousin, vous n’êtes pas difficile : j’improvisais, je laissais courir ma pensée sur les touches.

— En ce cas, votre pensée, ma chère Laure, était bien triste.

— Pourquoi pas ?… Est-ce qu’il m’est défendu, à moi, d’être triste ? Ne puis-je, par hasard, avoir du chagrin comme le commun des mortels ?

— Oh ! vous avez certainement ce droit ; mais, pour ma part, je souhaiterais de tout mon cœur vous le voir exercer moins souvent.

— Que vous importe ? riposta Laure, avec une nuance d’amertume. Est-ce que ces choses-là dérangent un homme comme vous, qui n’a d’attention que pour d’affreux livres de médecine ?

— Laure, répliqua Champfort un peu ému, me croyez-vous sans cœur, et votre antipathie pour moi va-t-elle jusqu’à me refuser d’avoir de l’affection pour vous et votre famille ?…

— Que parlez-vous d’antipathie ? interrompit la jeune fille.

— Jusqu’à arrêter sur mes lèvres l’expression du profond intérêt que je porte à tous les membres d’une famille qui m’est chère par le double lien du