Page:Dick - Le Roi des étudiants, 1903.djvu/76

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me à peine contenue, je sais toute l’affection que vous avez eue et que vous avez encore pour moi. Je n’oublie pas, non plus, et n’oublierai jamais que je vous dois tout et que, d’un orphelin malheureux et sans avenir, vous avez fait un fils et un homme en mesure de vivre honorablement. Aussi, je serais au désespoir de vous causer le moindre ennui, le moindre chagrin, ce qui arrivera inévitablement si je continue à me rencontrer avec ma cousine. Souffrez donc…

— Où veux-tu en venir, mon enfant ?

— Souffrez donc, reprit le jeune homme avec une fermeté douloureuse et se levant, souffrez que je me retire pour quelque temps de votre famille… jusqu’à des jours meilleurs.

Et il s’inclina devant sa tante, prêt à prendre congé.

Laure, la froide et hautaine créole, eut alors un cri de l’âme.

« Oh ! Paul, Paul, vous êtes bien dur pour moi… plus dur que vous ne pensez ! »

Paul, tout surpris, regarda sa cousine. Il n’était plus habitué à l’entendre lui parler de cette voix émue, presque suppliante, et à voir sur la belle figure de Laure cette franche expression de chagrin. Sa colère se fondit comme par enchantement et une immense pitié envahissant soudain son bon cœur, il fléchit le genou devant Mlle Privat et, prenant une de ses mains :

« Pardon, pardon, ma chère Laure… murmura-t-il. Je suis en effet cruel… mais l’espèce d’antipathie que vous me montrez, l’inexplicable froideur qui a remplacé, dans nos relations, la bonne et douce cordialité d’autrefois me font mal à l’âme et me rendent injuste malgré moi.