Page:Dick - Le Roi des étudiants, 1903.djvu/77

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— Relevez-vous mon cousin, répondit la jeune fille avec une douceur triste, et souvenez-vous qu’il ne faut jamais juger à la légère les sentiments d’une femme, quelque bizarre qu’ils paraissent.

— Je m’en souviendrai, Laure, » répondit Paul, que cette phrase ambiguë n’intriguait pas médiocrement.

Mme Privat fut aussi un peu frappée de cette recommandation étrange ; mais comme les impressions ordinaires n’avaient pas le temps de prendre racine dans son caractère mobile et léger, elle ne s’y arrêta pas autrement et dit aux jeunes gens :

« Bien, mes enfants, vous avez fait votre paix ; je suis contente. Signez-la d’un bon baiser et qu’il ne soit plus question de querelle entre vous.

— Mais, ma mère… se récria Laure.

— Pas de « mais ! » … embrasse ton cousin, ou plutôt ton frère Paul. »

Laure hésitait, rougissante… Ce que voyant, Champfort s’avança bravement, quoique un peu ému, un peu pâlot, prit la belle tête de sa cousine entre ses mains et baisa bruyamment ses deux joues devenues rouges comme des cerises mûres.

Puis il regagna sa place, tout frissonnant.

Depuis plus de deux ans, ses lèvres n’avaient pas effleuré la peau fine et veloutée de sa sœur d’adoption, et ce baiser inattendu faisait courir dans ses veines mille flèches brûlantes. En quelques secondes, son amour, jusque là fortement comprimé par une volonté de fer, secoua ses entraves et envahit son cœur avec la force d’expansion de la poudre… Le sang lui afflua au cerveau, et il rougit comme un écolier surpris en flagrant délit de