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CHAPITRE VI

LE PHARE


Qu’il pleuve, qu’il grêle ou qu’il tonne,
Par calme plat ou vent d’automne,
 Œil vigilant
 Toujours veillant,
Ton doux regard, dans la nuit sombre,
Phare brillant, éclaire l’ombre.

Ouvre tes yeux, timonier…
Ce feu là-bas, prisonnier,
 L’État l’allume
 Parmi la brume :
C’est le salut et c’est le port,
La récompense après l’effort.

Quand des cieux nous tombe la brume
Sur le grand fleuve au dos qui fume,
 Que son œil clos
 Se ferme aux flots,
Hardis marins, c’est le tonnerre
De son canon qui vous éclaire.

Aimez le Phare et son gardien
Quand vous perdrez le méridien
 Dans les nuits noires…
 Ah ! que d’histoires
Ils pourraient dire, ô matelots
Qui vous bercez au gré des flots !


La journée s’écoula sans amener rien d’extraordinaire, — si ce n’est toutefois le passage de deux vaisseaux : un paquebot charbonnier et une barque norvégienne.

Le premier filait à toute vapeur.

Le second, bonnettes déployées, semblait lui aussi pressé de sortir du détroit.

Évidemment ils sentaient sur leur poupe l’approche de la tempête, dont la voix mugissante prenait d’heure en heure des intonations plus menaçantes.

À la tombée de la nuit, il y eut détente, une sorte de relâche.

La brise parut mollir.

Mais Thomas, après avoir inspecté l’horizon de l’est, fit une moue qui semblait dire : Tu te reposes, ma gaillarde, mais c’est pour mieux travailler… quand le soleil n’y sera plus.

En effet, vers les huit heures du soir, alors que les grandes ombres projetées par les montagnes de la côte commençaient à s’allonger indéfiniment et que la vague froide des nuits du golfe s’étendait sur le détroit, le « nordêt », roi de ces parages, se reprit à souffler furieusement dans sa conque marine.