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— Je choisis le gabier, ce soir.

— Oui, j’aurai à grimper le long de ce sapin pour ajuster ma toile cirée en face de la lampe de l’ami Blouin : c’est besogne de gabier.

— Exactement. Mais il faudra attendre que le vieux soit tout à fait « allumé », avant de coiffer son fanal.

— Je ne grimperai là-haut que lorsque vous aurez une bonne quinte de toux. C’est entendu.

— Bien, mon vieux mathurin. Allons, houp ! enlevons ce corps mort et en route !

Après avoir hissé chacun une extrémité du tronc d’arbre sur leur épaule, les deux nocturnes visiteurs prirent à pas de loup la direction du phare, ayant bien soin de longer la rive et de faire le moins de bruit possible.

Arrivé à quelques perches de la tour octogonale servant de phare, Jean Brest, qui portait le plus gros bout du tronc et se trouvait en tête, tourna un peu à droite et escalada une déclivité assez raide, au haut de laquelle se profilait, toute blanche, la tour du phare, sur le fond sombre du firmament.

Naturellement on marchait avec des précautions infinies, afin de ne pas éveiller l’attention du gardien.

Du reste, celui-ci devait-être à cent lieues de se douter que des pirates français, par une nuit de tempête, en voulaient à sa lumière.

Il ne donnait pas signe de vie.

L’échelle improvisée fut dressée contre la tour et se trouva être de longueur suffisante pour la besogne à accomplir.

Cette opération terminée, Thomas dit à son compère :

— Maintenant, mon vieux, retournons à la chaloupe, toi pour y prendre ton paravent, — je veux dire ton paralumière, — et moi pour glisser quelques bouteilles de « Saint-Pierre » dans les cachettes de ma vareuse.

Ce fut vite fait.

Puis, quand les deux hommes se séparèrent, Jean Brest crut de son devoir de hasarder timidement :